Dans cette intervention, nous exposons des informations générales sur l’épilepsie avant de partager notre propre témoignage.

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Transcription:

[Kara] Bonjour et merci d’avoir voulu parler du thème de l’épilepsie! Je te laisse te présenter et présenter le sujet.

[Makina] Qui sommes-nous? Nous sommes Makina, le système de La Machine, un système d’une quinzaine d’alters. Nous sommes autistes, épileptiques, gentils. Le corps est transféminin et nous souffrons d’une condition physique altérant notre mobilité. Je m’appelle Garance, je suis l’hôte du système et je suis ici aujourd’hui pour vous parler de l’interaction entre l’épilepsie et le TDI. Dans cette intervention, je vais vous exposer des informations générales sur l’épilepsie avant de partager mon propre témoignage. Tout d’abord, qu’est-ce que l’épilepsie n’est pas? Ce n’est pas un épilateur spécialement conçu par ou pour Epsi. Ce n’est pas non plus une marque de piles lancée par Epsi. Ce n’est pas non plus un psy épilé spécialement dans… bon, je crois qu’on pourrait continuer comme ça toute la journée mais je crois que vous avez compris et vous avez autre chose à faire [rire]. Qu’est-ce que l’épilepsie? L’épilepsie est un trouble neurologique chronique caractérisé par des crises récurrentes. Ces crises sont dues à des décharges électriques anormales dans le cerveau. Les symptômes de l’épilepsie peuvent varier considérablement d’une personne à l’autre en fonction de la zone du cerveau affectée. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je vous propose d’aborder un mythe assez tenace, répandu et qu’on n’en peut plus d’entendre. Vous avez probablement déjà entendu dire que nous n’utilisons que 10% de notre cerveau comme si nous gardions en nous un potentiel inexploité ou que nos cerveaux étaient de grands paresseux démissionnaires. Le problème avec cette affirmation, c’est qu’elle insinue que vous n’utilisez que 10% de votre maison parce que vous n’êtes pas dans toutes les pièces à la fois. J’ai ici une autre métaphore qui devrait peut-être mieux vous parler: vous n’utilisez que 10% de votre ordinateur parce que vous n’ouvrez pas tous les fichiers et programmes en même temps. Dans la pratique, si vous le faites… euh comment vous dire… disons que votre appareil va connaître une fin prématurée. Votre cerveau est une merveilleuse machine qui ne s’arrête jamais, même quand vous dormez. Il garde toujours une activité dont la configuration change constamment au cours de la journée, un peu comme s’il se transformait de l’intérieur. Et il traite des milliards de données, d’autant plus lorsque vous le stimulez activement en réalisant certaines tâches ou activités comme lire, jouer d’un instrument, faire du sport, etc. Il arrive que le cerveau dépasse un certain seuil dans la quantité de données qu’il peut traiter. À ce moment-là, la réponse peut se traduire par une sorte de réinitialisation. La crise d’épilepsie résulte d’une décharge électrique anormale et excessive dans le cerveau, comparable à un plantage informatique: la réponse est de tout arrêter pour retourner à la normale. C’est là que peuvent survenir des crises spécifiques telles que les pertes de conscience et les absences. Comme nous venons de le voir, notre cerveau est en constante activité, répartissant ses ressources selon les besoins à chaque instant, mais il arrive que cette utilisation constante et complexe puisse parfois aboutir à des “plantages”. Ce qu’il faut retenir, c’est que l’épilepsie est le résultat de cette surcharge de l’activité cérébrale et que cette surcharge dépend de facteurs propres à chaque cerveau. Donc non, vous utilisez bien 100% de votre cerveau mais pas toujours au même moment. Votre cerveau est un grand bosseur, ne le sous-estimez pas.

[K] Est-ce qu’il y a plusieurs types de crises d’épilepsie?

[M] Alors, oui. Il y a les crises focales, qui affectent une partie spécifique du cerveau, qui peuvent inclure des mouvements involontaires ou des sensations inhabituelles ; et les crises généralisées, qui affectent les deux hémisphères du cerveau et qui peuvent inclure des convulsions tonico-cloniques, des absences, etc.

[K] Est-ce que toutes les crises sont des crises convulsives?

[M] Non. Les crises convulsives concernent une minorité de personnes épileptiques. Je crois que les personnes qui font des crises convulsives, c’est moins d’un tiers, sur toutes les personnes épileptiques, sachant que l’épilepsie concerne 1% de la population. Et malheureusement, on parle assez peu des autres formes d’épilepsie, qui peuvent être assez handicapantes, que ce soit sur le plan scolaire, social, professionnel, …

[K] Qu’est-ce qu’il y a d’autre comme symptômes?

[M] En dehors des convulsions, il y a des pertes de conscience, des mouvements involontaires, des sensations étranges avant une crise – qu’on peut appeler “aura” -, il y a les sensations de déjà-vu, il y a les absences, les flous cérébraux, …

[K] Et toi, tu as des crises convulsives et des pertes de connaissance?

[M] Alors personnellement, je n’ai pas de pertes de connaissance, ce sont plutôt des absences. Alors il y a deux cas de figure dans ces absences. Par exemple, je peux continuer un mouvement ou une activité et ne pas me rendre compte que je suis en crise, auquel cas ça peut être un flou cérébral qui va se suivre d’une amnésie partielle ou totale. Ou alors, je peux complètement freezer, avec un regard vide, un peu comme Niffty face caméra [rire].

[K] Est-ce qu’il y a des raisons qui expliquent l’origine de l’épilepsie?

[M] Alors, oui. Il y a les épilepsies idiopathiques, des formes d’épilepsie sans cause identifiable. Il y a l’épilepsie symptomatique, due à une anomalie cérébrale identifiable telle qu’un traumatisme crânien, une infection, etc. Il y a aussi les épilepsies cryptogéniques, suspectées d’avoir une cause sous-jacente mais non identifiée par les examens actuels.

[K] C’est quoi la cause de ton épilepsie?

[M] Je n’ai pas les connaissances suffisantes mais pour ce que je peux en lire, je semble plutôt concernée par les crises généralisées.

[K] Quels sont tes symptômes à toi?

[M] Alors, ça peut être dans certaines formes des maux de tête, des sensations de picotements, des engourdissements. Il y a également des symptômes psychologiques, par exemple un sentiment de désorientation. Des changements de comportement aussi, je peux par exemple devenir agressive verbalement.

[K] Ça peut ressembler à des symptômes dissociatifs en fait?

[M] Oui, les crises d’épilepsie et les crises dissociatives sont assez similaires en fait, donc ça peut être très difficile de les différencier. La plupart du temps, je ne parviens pas à faire la différence. Et surtout, ça peut être difficile, je pense, pour certaines personnes souffrant de troubles dissociatifs, d’accéder au diagnostic d’épilepsie.

[K] Comment se diagnostique l’épilepsie?

[M] L’épilepsie se diagnostique systématiquement par un EEG. En fait, il s’agit d’un examen où on place un casque avec des petites électrodes sur la tête pour scanner l’activité cérébrale, au cours de 20 petites minutes. Et, en fonction de différentes simulations telles que la lumière, la respiration, l’effort physique, eh bien l’activité cérébrale qui en résulte peut servir de repère pour le diagnostic. Donc une personne souffrant de trouble dissociatif peut très bien, du jour au lendemain, passer un EEG et se découvrir épileptique.

[K] C’est ce qui s’est passé pour toi?

[M] Nous étions au courant pour la multiplicité et la dissociation, et c’est quelques années après que nous avons réalisé que nous étions épileptiques. À l’époque, j’ai parlé de mes absences et du sentiment de dissociation à mon médecin généraliste et il m’a tout simplement dirigée vers un neurologue pour passer un EEG. Et c’est à ma grande surprise que j’ai découvert que j’étais épileptique. D’ailleurs, ça ne veut pas dire qu’être épileptique invalide votre multiplicité, enfin vous pouvez très bien être multiple et souffrir d’épilepsie, et il peut aussi y avoir une interaction entre les deux.

[K] Ça a eu un impact sur votre légitimité?

[M] Absolument. Je me suis dit: “du coup, ça veut dire que je simule ou que que mes alters ne sont que des impulsions électriques dans ma tête”. Un jour, une de mes protectrices a dit “en vrai, je crois que j’ai inventé Garance” [rire]. C’est tout. En fait, c’était un peu comme une uno reverse card que je me suis pris en pleine tête et ça a eu son petit effet [rire].

[K] Est-ce que le type de déclencheur peut aider à différencier si c’est une crise d’épilepsie ou une crise dissociative?

[M] Effectivement. Dans certaines crises [d’épilepsie], je peux souffrir de symptômes psychologiques mais ce n’est pas le principal déclencheur. Dans mon cas, il s’agit plutôt d’efforts physiques et respiratoires ou de stress. Une chose qui peut “distinguer”, entre guillemets, l’épilepsie et la dissociation, c’est le niveau de fatigue.

[K] Qu’est-ce qui est le plus fatiguant?

[M] L’épilepsie, je dirais.

[K] Est-ce que l’épilepsie se traite?

[M] Oui. En général, on prescrit des antiépileptiques et il faut réaliser un EEG une fois par an et assurer un suivi de deux séances par an avec un neurologue.

[K] Est-ce que ton traitement t’a aidée?

[M] Je dirais plutôt oui. En contrepartie, j’ai plus de difficultés à communiquer avec le reste du système.

[K] Est-ce que grâce au médicament, connaître la source des crises est plus simple?

[M] La réponse est assez claire: ça dépend! Malheureusement, dans la majorité des cas, le traitement antiépileptique ne supprime pas totalement les crises d’épilepsie. Je souffre encore de crises et j’ai peut-être moins de flou cérébral.

[K] Combien de temps dure une crise?

[M] Entre quelques minutes et plusieurs heures.

[K] Est-ce que tu as envie de dire quelque chose aux gens?

[M] Si je peux avoir une chose à dire, ce serait: soyez curieux. Posez des questions, renseignez-vous, faites des recherches. N’ayez pas peur du sentiment d’illégitimité. Prenez soin de vous. Et l’épilepsie peut être une vraie maladie et vous ne devriez pas avoir peur de la traiter à cause du sentiment de légitimité parce que ça peut avoir des répercussions au fil du temps.

[K] Merci beaucoup! C’était très intéressant et on va passer aux questions-réponses. À tout de suite!

Intervention proposée par:

  • La Machine (Elle/Iel/Ellui/She/Her/They/Them)
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