Dans cette vidéo, on explique ce que sont les avertissements de contenu, leur utilité, comment les utiliser et quelles en sont les limites.
Dans cette vidéo, on explique ce que sont les avertissements de contenu, leur utilité, comment les utiliser et quelles en sont les limites.
Les avertissements de contenu, qu’on appelle aussi souvent trigger warning ou encore content warning, servent donc à prévenir que le sujet qui va être abordé risque d’être déclenchant pour certaines personnes. En gros, vous voyez quand il y a un avertissement au début d’une vidéo qui prévient de la présence de lumières stroboscopiques pour limiter les risques de crises chez les personnes épileptiques ? Ou encore quand les allergènes sont écrits sur les emballages d’aliment pour éviter les risques d’anaphylaxie chez les personnes allergiques ? Eh ben les avertissements de contenu, c’est la même chose, c’est avertir qu’un sujet spécifique va être abordé pour éviter les réactions chez les personnes traumatisées ou sensibles à ces sujets
[Epsi] On explique plus en détails ce qu’il se passe durant un traumatisme dans la vidéo sur comment se forment les alters, on vous la met dans le i et en description. Mais pour faire un bref rappel théorique, lors d’un gros choc émotionnel, le cerveau peut surchauffer et finir par, en quelques sortes, disjoncter pour se protéger lui-même et le corps. Ce mécanisme de protection peut engendrer plusieurs choses, notamment le fait que l’information de ce qu’il s’est passé n’est pas correctement traitée et peut en quelques sortes rester bloquée. Et le fait que tout rappel de cet événement peut ramener le cerveau en état de stress, en alerte danger. Les avertissements de contenu, dans ce cadre-ci, servent à éviter les rappels traumatiques, qui peuvent déclencher tout un tas de réactions comme des crises d’angoisse, de dissociation, de retraumatisation, de flashbacks, etc…
Les avertissements de contenu servent aussi dans plein d’autres contextes qui peuvent être difficiles ou anxiogènes pour certaines personnes, on pense par exemple aux addictions, aux oppressions systémiques, aux TCA, et plein d’autres choses, mais ici on parle surtout du lien avec les traumas. Même si en soi ces sujets amènent leurs lots de traumas mais bref !
[K] Petite info en passant : si vous avez l’impression de ne pas ressentir de rappels traumatiques, ça ne veut pas dire que vous n’êtes pas traumatisé, en fait la manifestation des rappels va dépendre de chaque personne, mais on y revient après, vous êtes légitimes.
Alors concrètement, comment on fait ? Ce qui est fait le plus fréquemment sur Internet, c’est d’indiquer le sujet en début de message ou juste avant que le sujet soit effectivement abordé en fonction de la situation, surtout si le sujet va être développé et pas seulement mentionné. Il y a pas mal de gens qui mettent TW avant le sujet, pour trigger warning, ou encore CW, pour content warning. La différence entre trigger warning et content warning est plutôt subtile dans ce contexte. On utilise plutôt TW pour des sujets spécifiques liés à des traumatismes et on utilise plutôt CW pour des sujets plus larges, des thèmes qui peuvent mettre mal à l’aise. Très honnêtement, nous-mêmes on fait peu la nuance entre les deux et on les utilise sans distinction, le plus important selon nous c’est de préciser le sujet.
Parlons-en d’ailleurs. C’est quelque chose qu’on voit assez régulièrement, qu’il y ait seulement une mention de “sujet sensible”, de “trigger warning”, mais sans précision de quoi. Bah un peu de la même façon que préciser les allergènes c’est important parce qu’il y a des gens allergiques aux arachides et d’autres au gluten, spécifier le sujet est selon nous vraiment essentiel. En fait, le but d’un avertissement de contenu, au-delà d’éviter la surprise de tomber sur un rappel traumatique, c’est de permettre aux gens de choisir s’ils veulent continuer à lire ou à écouter ou pas. Si le sujet n’est pas précisé, difficile de savoir si ça peut nous déclencher ou pas, tandis qu’en connaissant le sujet, on peut choisir si on veut aller plus loin, en fonction du sujet lui-même ou de comment on se sent, etc… ou choisir de s’arrêter là pour notre bien-être.
Du coup, question bonnes pratiques, le mieux est donc de préciser le sujet, avec TW ou CW devant si on veut. Attention, si possible, même si ça dépend des endroits, évitez de mettre des étoiles ou des symboles à la place des lettres sur certains mots, tout simplement parce que c’est difficile à comprendre pour les gens qui utilisent un lecteur d’écran notamment. Du coup pour tout ce qui peut être lu par un lecteur d’écran, préférez mettre le mot en clair sauf si l’endroit où vous postez précise de faire autrement.
Pour tout ce qui est contenu audio ou vidéo, c’est pareil, c’est bien de préciser avant d’aborder le sujet. À nouveau, pour l’accessibilité, préférez le dire oralement plutôt que de seulement l’afficher à l’écran, ou prévoyez de le préciser dans les sous-titres ou une transcription, pour les personnes qui ne peuvent pas voir l’écran.
[E] Dans nos vidéos par exemple, on essaie vraiment de préciser les sujets avant de les aborder et on essaie de mettre le minutage du sujet à l’écran et dans la description de la vidéo si c’est assez long. Un autre truc qu’on essaie de faire, surtout à l’écrit mais aussi parfois en vidéo, c’est de préciser le sujet mais aussi de préciser s’il va seulement être mentionné ou s’il va être développé, pour essayer de vraiment laisser un maximum de choix de continuer à lire ou pas.
Ah euh un autre truc qu’on voit souvent, c’est l’utilisation d’emoji à la place du sujet, et honnêtement on a un avis assez mitigé là-dessus parce que d’un côté ça permet d’éviter d’écrire le sujet en clair, parce que certaines personnes sont déclenchées par le mot lui-même, mais en même temps c’est pas encore vraiment universel comme pratique, c’est difficile à mémoriser, et puis c’est pas toujours accessible, notamment pour les personnes qui voient mal les couleurs ou encore une fois pour les lecteurs d’écran. Du coup, voilà, si vous les utilisez souvent, faites peut-être une charte avec les emoji et leur signification facilement trouvable pour que ce soit accessible au plus grand nombre, et surtout précisez qu’il s’agit d’avertissements de contenu.
Une dernière petite chose concernant les sujets des avertissements de contenu : essayez de vous assurer de ne pas donner trop de détails tout en faisant preuve de précision. Haha compliqué dit comme ça. Mais par exemple, mettez le thème plus large, puis le sujet plus précis, pour vraiment permettre aux gens de pouvoir choisir ou non de continuer. Donc si par exemple le sujet c’est, je sais pas moi, les canards, j’espère vraiment que personne est trigger par les canards, si c’est le cas vraiment désolé, mais on peut mettre par exemple TW oiseau puis TW canards (explication) puis écrire son message sur les canards. Et à l’inverse, pas besoin de faire de l’excès de zèle en mettant canards alors que vous allez brièvement mentionner les oiseaux en général, le trop est parfois l’ennemi du bien.
[K] Alors une question qui revient souvent du coup c’est : qu’est-ce qu’on doit écrire comme avertissements de contenu ? C’est là que ça peut effectivement devenir plus compliqué, parce que tout peut être un déclencheur. Eh oui, lors d’un trauma par exemple, le cerveau ne traite pas l’information correctement et il peut associer n’importe quoi en lien de près ou de loin à ce qu’il s’est passé à un signal de danger. Du coup ça peut être l’objet du trauma mais aussi la date, le climat, l’endroit, des images, des odeurs, des éléments de décor, une autre pensée qui passait par là par hasard, etc, etc…
En effet, un traumatisme c’est strictement personnel, ce qui va traumatiser quelqu’un ne traumatisera pas quelqu’un d’autre et inversement, et c’est pareil pour les déclencheurs. De la même façon, la manifestation des rappels traumatiques sera aussi différente pour tout le monde, certaines personnes vont partir en crise dissociation, en switches rapides ou en flashbacks manifestes, d’autres vont plutôt devenir irritables ou fatiguées dans les heures qui suivent sans se rendre compte qu’elles ont été confrontées à un déclencheur, certaines pensent même qu’elles ne sont déclenchées par rien, ça dépend vraiment des gens.
[E] Mais alors comment faire ? Est-ce qu’on doit mettre un trigger warning sur absolument tout ? Eh bien en fait, ça va surtout dépendre des endroits et du nombre de personnes qui vont potentiellement avoir accès au contenu. Par exemple, pour un film ou un livre, ou même du contenu sur l’Internet public, on va surtout mettre des avertissements de contenu sur les sujets les plus connus comme susceptibles de laisser des traumas.
Alors petit rappel : il n’y a pas de trauma graves ou pas graves, tout choc émotionnel peut amener à un trauma et il n’y a pas à juger de ça, par contre c’est vrai qu’il y a des situations qui ont tendance à laisser plus facilement des traumas que d’autres, et c’est pour ces sujets qu’on va plus systématiquement mettre un trigger warning
Si ça peut vous aider, on va vous mettre en description une liste de sujets considérés communément comme pouvant déclencher des réactions, mais elle ne sera pas exhaustive évidemment. Pour le reste, pour des espaces plus privés comme des groupes plus restreints, comme des groupes Facebook ou des Discord par exemple, bah ça va un peu dépendre de ce qui se fait dans la communauté en question.
En fait, plus la communauté est grande, plus c’est difficile de mettre des avertissements précis parce que justement plus il y a de gens plus il y a de risques de déclencher quelqu’un, mais plus ça peut être difficile de se souvenir des déclencheurs de tout le monde pour bien baliser son contenu. Alors c’est un peu aux responsables des communautés de décider de comment ça se passe. Nous, par exemple, on essaie de mettre une liste des sujets les plus connus comme déclenchants pour lesquels tout le monde doit mettre des avertissements de contenu, mais chacun-chacune peut demander à quelqu’un d’autre d’éditer un message pour ajouter un trigger warning si besoin. Mais c’est une façon de faire parmi d’autres ! Voyez comment font les autres dans les communautés où vous êtes et faites de même, ou demandez si vous n’êtes pas sûr. Et pour les endroits plus restreints, avec vos proches, dans des petites conversations Messenger, etc… là il y a plus moyen de pouvoir vraiment respecter les déclencheurs de tout le monde pour s’assurer à soi-même des espaces safes.
[K] Alors maintenant, on va rapidement faire un petit tour de 5 idées reçues et remarques désobligeantes qu’on peut entendre au sujet des avertissements de contenu, pour voir comment vous pouvez y répondre si vous voulez.
La première “Ouais mais du coup tout le monde demande des trigger warning pour rien du tout !”. Alors comme on l’a dit, tout peut être un déclencheur, et juger des déclencheurs des autres ne sert vraiment à rien. Par contre c’est vrai que parfois, on peut ne pas penser à tout ou oublier des triggers spécifiques de certaines personnes, à nouveau c’est important de voir selon la taille de la communauté et de faire au mieux des deux côtés, ça fait un peu partir des limites des avertissements de contenu, mais on n’a pas à juger, juste à laisser aux autres le choix.
[E] La deuxième “Ouais mais mettre des trigger warning c’est chiant et ça prend des ressources”. Comme plein d’autres choses et il y a vraiment moyen de faire des compromis à ce sujet, encore une fois en fonction de l’endroit. Par exemple, nous on a fait une section où les avertissements de contenu ne sont pas obligatoires mais où il n’est quand même pas autorisé d’être trop explicite ou graphique, pour soulager de la difficulté de réfléchir aux trigger warning sans malgré tout déclencher tout le monde. On a fait comme ça parce qu’on peut se le permettre parce que l’équipe de modération sait le gérer. Il y a évidemment plein d’autres façons de faire, comme préciser dans votre bio Twitter que vous ne mettez pas d’avertissements de contenu pour que les gens puissent agir en conséquences par exemple, ou rejoindre des endroits où ce n’est pas demandé. Mais juste “c’est chiant” ou “mais moi j’en ai pas besoin et je l’impose à personne” n’est pas une excuse non plus …
[K] La troisième, on l’a vue beaucoup trop souvent, c’est “ça spoile le livre/le film”. Alors à ça vraiment j’ai juste envie de répondre “bah lisez pas les pages d’avertissements de contenu”, si vous n’avez pas d’allergies vous lisez pas les allergènes ? Bah c’est pareil… laissez le choix aux autres, vous l’avez aussi en fait.
[E] La quatrième, c’est “si t’en as besoin c’est que t’es trop fragile pour aller sur Internet”. Non, juste non, avoir des déclencheurs ne doit pas nous empêcher de vivre avec le reste du monde, y compris le monde virtuel qu’est Internet, hein, bon, voilà. Y a des endroits où on peut pas parler de tout et c’est normal. Eh puis Internet au sens large, c’est quand même un espace public, où c’est important d’essayer de faire attention aux personnes plus sensibles simplement.
[K] La cinquième, c’est “les trigger warning rendent sensibles aux déclencheurs”. Là ça mériterait sans doute plus de développement mais on va essayer de la faire courte. Ce qui sensibilise aux déclencheurs, c’est la raison d’existence de ces déclencheurs, par exemple les traumas. Et on peut avoir l’impression de devenir plus sensibles à ses propres déclencheurs mais en fait c’est la conscientisation de ses traumas et de ses déclencheurs qui peut donner cette sensation, comme prendre conscience de sa multiplicité donne l’impression que les manifestations sont plus fortes, idem pour la prise de conscience de l’autisme ou de toute autre chose en fait, mais c’est souvent temporaire même si ça peut être plus ou moins long. Mais c’est pas vraiment le fait qu’il y ait des avertissements de contenu qui rend sensible, c’est l’objet de sensibilités en lui-même, les trigger warning servent seulement à prévenir et permettre aux gens de ne pas aller plus loin s’ils le veulent, c’est tout. D’ailleurs, les thérapies d’exposition, notamment utilisées pour traiter les phobies, ne fonctionnent pas sur les rappels traumatiques, du coup pas besoin de s’exposer à ses déclencheurs si on se sent pas à l’aise de le faire, encore une fois c’est vraiment la notion importante de cette vidéo : il faut surtout essayer de laisser le choix !
[E] Avant de terminer cette vidéo, on va parler d’un cas particulier qui peut arriver, c’est le fait d’avoir des déclencheurs qui s’opposent ou qui se déclenchent mutuellement entre deux personnes. Par exemple, des gens à qui on a dit qu’ils n’avaient pas le droit de parler, peu importe la raison, et qui aujourd’hui voudraient parler mais que quelqu’un répond que ce qu’ils disent les trigger, ou encore le sujet des doublons avec des gens qui sont très mal à l’aise de voir d’autres alters ayant la même source dans d’autres systèmes et qui du coup leur disent de ne pas interagir voire de ne pas se montrer alors que ces mêmes alters sont déclenchés parce qu’on leur dit en quelques sortes qu’iels n’ont pas le droit d’exister, et tout un tas d’autres situations spécifiques et complexes où souvent personne n’a vraiment raison et personne n’a vraiment tort. Alors on sait que c’est difficile mais si ça arrive essayez s’il vous plait de faire un pas en dehors de la situation, de faire un break, de prendre un moment pour vous, et d’y revenir plus tard. Il y a des compromis possibles, comme pour plein de situations, mais essayer de déterminer qui est dans le vrai et qui est dans le faux à l’instant T ne fonctionne souvent pas bien, surtout quand on est déclenché, ça peut vraiment compliquer les choses. Prenez soin de vous, masquez ou bloquez si nécessaire, essayez de ne pas faire ressentir à d’autres que leurs propos ou leur existence sont illégitimes, discutez et trouvez un terrain d’entente si possible, et encore une fois, laissez-vous mutuellement le choix.
[K] Enfin, dernier point, vraiment le dernier cette fois-ci haha, utiliser des avertissements de contenu ne permet quand même pas de parler de tout partout. C’est encore un sujet plus spécifique mais ça arrive souvent que sous couvert de trigger warning, il y ait des propos trop explicites, trop graphiques, n’oubliez pas de laisser le choix et d’être précis dans vos avertissements de contenu si vous voulez expliciter plus. D’un point de vue personnel, on pense que les contenus graphiques devraient être réservés aux espaces plus privés avec le consentement spécifique et conscient des personnes qui vont le recevoir, et loin de personnes malintentionnées qui pourraient tomber dessus. Et pareil bien sûr, les avertissements ne justifient pas non plus des contenus totalement déplacés voire insultants ou même dangereux comme du racisme, de la transphobie ou autre.
[E] Pour résumer tout ça, un exemple avec une phrase pas trigger on l’espère : “Cette nuit j’ai fait un cauchemar à propos de fleurs qui …”. Ca c’est oui parce que c’est d’abord le thème général puis le sujet précis plus explicite qui sont annoncés dans cet ordre, avant le message.
(Sur l’image :
CW cauchemar
TW fleurs (explication)
“Cette nuit j’ai fait un cauchemar à propos de fleurs qui …” )
[K] Ca on évite, “TW” et rien du tout avec pas de sujet, on évite.
(Sur l’image :
TW
“Cette nuit j’ai fait un cauchemar à propos de fleurs qui …” )
Ca aussi on évite, “TW” avec le mot écrit avec des signes pour remplacer des lettres, c’est pas accessible notamment aux lecteurs d’écran
(Sur l’image :
TW c@uch€m*r
“Cette nuit j’ai fait un cauchemar à propos de fleurs qui …” )
[E] Et ça c’est non, y a juste pas d’avertissement du tout
(Sur l’image :
“Cette nuit j’ai fait un cauchemar à propos de fleurs qui … et … ” )
[K] Voilà, on espère que grâce à cet exemple et à tout le reste de la vidéo, ce sera plus clair. Merci beaucoup d’être resté-es jusqu’ici, on se retrouve ici un dimanche sur deux sur Youtube à 18h, et le reste du temps sur les réseaux sociaux, sur la chaine secondaire, sur Tiktok, sur Twitch un jour quand on s’y remettra mais je sais pas quand, et voilà voilà. Prenez bien soin de vous et à bientôt !